top of page
Rechercher

L’attachement, ou comment nos blessures peuvent façonner nos liens


Pourquoi peut-il etre si difficile d’aimer, de faire confiance, de se sentir en sécurité dans une relation? Pourquoi a t'on parfois l'impression de ne jamais pouvoir être complètement soi, authentique, vulnérable ? Pourquoi certaines situations réveillent en nous des peurs ou des réactions qui peuvent sembler disproportionnées ?

Pour comprendre cela, la théorie de l’attachement est une grille de lecture précieuse – et quand on l’articule au psychotrauma, elle devient un outil puissant de déconstruction et de libération.



L’attachement : une histoire de survie, pas de romantisme


La théorie de l’attachement a été développée par le psychiatre John Bowlby dans les années 1950. Elle repose sur une idée simple mais puissante : les êtres humains, dès la naissance, ont un besoin vital de lien. Pour survivre, un·e bébé dépend entièrement des personnes qui prennent soin de lui. Ce sont ses figures d'attachement.


Ce besoin de lien ne se limite pas à l’accès à la nourriture, au sommeil ou à un toit, les besoins relationnels sont tout aussi cruciaux, et malheureusement souvent invisibilisés.

Un·e bébé a besoin d’un regard qui le reconnaît, d’une présence qui la·e contient, d’une voix qui la·e rassure, de bras qui la·e consolent quand iel pleure...

Iel a besoin d’être vu·e, compris·e, accueilli·e dans ce qu’iel est, pas seulement pris en charge sur le plan physique. Ce sont les fondations de ce qu’on appelle la "sécurité intérieure" : ce sentiment que le monde est prévisible, que les autres sont globalement fiables, et que l'on est digne d’amour et de soin.

C’est dans cette dépendance des premiers temps que se construisent les bases d'un système d’attachement : une manière d’entrer en relation, façonnée par les réponses (ou absences de réponses) de son environnement.

Si ces figures d’attachement sont stables, attentionnées et répondent de manière cohérente à ses besoins, l’enfant peut développer un attachement sécure. Mais si elles sont absentes, incohérentes, intrusives ou maltraitantes, cela peut créer des styles d’attachement insécures : anxieux, évitant ou désorganisé.


Ces besoins relationnels ne s’arrêtent pas avec l’enfance


Adulte, on continue à avoir besoin de lien, de sécurité affective, de réciprocité, de reconnaissance.

Le mythe de l’autonomie totale – souvent valorisé dans les sociétés capitalistes, patriarcales et validistes – nie cette dimension profondément humaine.

Il renforce l’idée qu’avoir besoin des autres est une faiblesse, alors qu’en réalité, notre besoin de lien est une force, un moteur de résilience, de créativité, de transformation.


Quand ces besoins n’ont pas été suffisamment remplis dans l’enfance, ou pire, quand ils ont été trahis par des violences (physiques, psychiques, sexuelles, symboliques), cela peut laisser des traces durables. Ce sont ces manques ou ces blessures relationnelles que la théorie de l’attachement permet de mettre en lumière.

Comprendre nos besoins relationnels est donc un acte de lucidité et de réparation. C’est reconnaître que celleux qui sont considéré·e comme "trop sensibles", "trop dépendant·es", "pas assez confiants·es" souffrent souvent des conséquences logiques de ce qui a manqué, voire de ce qui a été volé, ce ne sont pas des défauts à corriger.


Prendre conscience de ça, c’est un pas vers l’auto-empathie, vers la reconnaissance de ses propres besoins, leur formulation. C'est un chemin vers la construction d'une sécurité intérieure qui peut permettre de poser des limites et qu'elles soient enfin entendues, respectées, honorées.



Le psychotrauma : quand l’attachement est lui-même une blessure


Ce que le regard féministe apporte en plus, c’est que les blessures relationnelles ne sont pas seulement des "manques" ou des "ratés" à l'échelle individuelle. Elles sont souvent le produit de violences systémiques : maltraitances, inceste, violences conjugales, queerphobie, racisme, pauvreté, etc.

Elle s'inscrivent dans un contexte qui normalise, banalise, silencie les violences intrafamiliales.

Dans ces contextes, le lien d’attachement devient lui-même source de danger. L’enfant apprend que ce qu'iel considère comme de l’amour peut faire mal, que les limites n'existent pas ou ne seront pas respectées, que ses émotions dérangent ou qu’iel doit se taire pour ne pas aggraver la situation.

Iel peut aussi éprouver la déchirure profonde due au fait que les personnes sensées la·e protéger deviennent agresseur·euses ou complices.

Cela peut créer non seulement un attachement insécurisé, mais aussi un état de survie chronique, une hypervigilance, un gel émotionnel : c’est le cœur du psychotrauma relationnel.


Le cerveau humain apprend par la répétition, et ces schémas de relation, souvent marqués par le manque de limites, se rejouent à l’âge adulte, notamment dans les relations intimes.

Il est essentiel de comprendre que cette incapacité à poser des limites vient de l’absence d’apprentissage de celles-ci. Si, dans les premières relations, nos figures d’attachement n’ont pas su instaurer des limites claires et respectueuses, les enseigner, il devient difficile pour nous d’apprendre à les établir nous-mêmes. Au lieu de cela, il est possible de grandir avec l’idée que nos besoins et nos désirs étaient secondaires.

L’incapacité à poser des limites, à dire "non", ou à reconnaître les moments où une relation devient nuisible est souvent le fruit d’un manque de modèles sains dans notre environnement.

La société patriarcale, en particulier, joue un rôle central dans ce schéma. Elle valorise l’effacement des besoins individuels, surtout pour les personnes socialisées femmes, les personnes queer et racisées, qui sont souvent éduquées à se soumettre aux désirs et attentes des autres.

Les normes de pouvoir et de contrôle, omniprésentes dans notre culture, nous empêchent de développer un rapport sain à nos limites et à notre autonomie émotionnelle.

Ce manque de limites peut se traduire par des comportements adultes qui peuvent paraître contradictoires : d’un côté, une peur constante de perdre l’autre, une tendance à accepter l’inacceptable, ou au contraire, un repli émotionnel, une distance, une méfiance face à l’intimité. Ces réactions sont les conséquences d’un système et de figures d’attachement qui ne nous ont pas appris à affirmer notre droit à des relations respectueuses et équilibrées.



Une lecture queer et féministe de l’attachement


La théorie de l’attachement est souvent présentée de manière très normative : père-mère-enfant, couple monogame hétéro, etc.

Pourtant, nos attachements peuvent être multiples, choisis, communautaires, politiques. Il est possible d'avoir des figures d’attachement dans nos cercles queer, dans une coloc, dans une relation polyamoureuse...

Repenser l’attachement, c’est aussi désessentialiser l’idée que tout doit venir de l’amour romantique ou de la "famille" biologique. C’est se donner le droit de créer des liens qui nous protègent vraiment, qui nous rendent plus libres et plus vivants.

Et c’est là que le soin entre en jeu. En thérapie, mais aussi dans les espaces de soutien, de militantisme ou d’amitié profonde, il est possible de reconstruire un sentiment de sécurité intérieure. D’apprivoiser nos réactions, de comprendre qu’elles sont des traces d’anciens dangers. D’apprendre qu’on mérite un lien sans violence, sans emprise, sans condition.




Nos manières d’aimer ne sont pas des fatalités. Ce sont des stratégies de survie, façonnées dans des contextes très concrets. En les comprenant, en les mettant en mots, en les déconstruisant, on ouvre un espace pour d’autres façons d’être en lien : plus conscientes, plus tendres, plus puissantes aussi.


 
 
 

Comments


psy chambéry psychologue chambéry hypnose chambéry hypnothérapeute chambéry emdr chambéry

Perrine Tomek Psy Féministe Chambéry La Ravoire

Thérapeute Psychotrauma EMDR - DSA

Hypnothérapeute à Chambéry La Ravoire.

🏳️‍🌈LGBT friendly 🏳️‍⚧️Personnes trans bienvenu·es

2 rue du Villard 73490 La Ravoire

© 2025 par Perrine Tomek

bottom of page