Et si on osait questionner son identité de genre ?
- Perrine Tomek
- 18 avr.
- 4 min de lecture
Dans mon cabinet, je rencontre régulièrement des personnes qui arrivent avec un sentiment diffus de décalage.
Une impression de ne pas “rentrer dans les cases”, de se sentir en inadéquation sans toujours savoir pourquoi. Et très souvent, derrière ce flou identitaire se cache une question que notre société évite encore trop souvent :
Qui suis-je vraiment, au-delà des rôles de genre qu’on m’a appris à jouer ? Questionner son identité de genre, me semble être une étape importante du chemin vers un mieux être. Remettre en question les stéréotypes dans lesquels on a été parfois enfermé·es pendant longtemps n’est pas une “mode” ou une crise passagère.
C’est un acte de conscience, de lucidité, C'est parfois douloureux, souvent libérateur.
Et c’est un chemin que nous devrions toustes pouvoir emprunter, peu importe notre âge, notre vécu ou notre genre assigné à la naissance.

Le genre : une construction sociale.
Nous grandissons dans un monde où le genre nous est assigné bien avant même que nous ayons appris à parler. Avant même que nous soyons né·es les projections vont bon train.
Fille ou garçon : deux cases, deux scripts.
À chaque genre son code couleur, ses comportements attendus, ses rêves autorisés, ses futurs métiers admis, ses traits de caractères imposés, son espace délimité...
Mais qu’arrive-t-il quand ces scripts nous oppressent ? Quand la performance de genre devient un carcan, un rôle qui sonne faux, voire un mensonge ?
Le genre est une construction sociale. Cela ne veut pas dire qu’il est irréel, mais qu’il est produit, entretenu, transmis. Et qu’il peut, par conséquent, être déconstruit. Le voir ainsi, c’est déjà commencer à s’en libérer.
C’est ouvrir un espace de liberté où chacun·e peut redéfinir ses contours, ses désirs, ses appartenances.
Sortir des stéréotypes pour mieux se rencontrer
Les stéréotypes de genre sont partout : dans les jouets d’enfants, les pubs, les injonctions familiales, les normes scolaires, le monde du travail...
Ils nous dictent comment et qui aimer, comment parler, comment occuper l’espace, quelle tenues mettre, à quelle heure rentrer le soir... Ils réduisent énormément nos possibles souvent même sans que l'on en ait conscience.
Les stéréotypes de genre deviennent des injonctions qui disent voici ce que tu peux être, le reste est en dehors de la norme, il sera au mieux toléré, au pire discriminé sans cesse.
En tant que psychopraticienne, je constate combien ces normes pèsent, parfois même à l’insu des personnes concernées.
Par exemple : des femmes qui peuvent s’épuiser à être “agréables” et “disponibles”, qui ne savent pas faire l'expérience de la colère, ou si elles sont en colère qui sont rejetées... Des hommes qui peuvent être déconnectés de leurs émotions, qui se sentent en échec car incapable de performer des attentes virilistes qui sont loin d'eux. Des personnes non-binaires qui luttent pour exister dans une société qui les invisibilise ou les discrimine.
Questionner ces injonctions, les remettre en perspective, les déconstruire c’est rendre à chacun·e le droit d’exister pleinement, dans sa complexité, son unicité, sa vérité.
S’affirmer en conscience, un chemin vers soi
Ce questionnement peut être éprouvant, il peut remuer, ébranler. Il peut aussi forcer à affronter des peurs : celle d’être rejeté·e, mal compris·e, voire invisibilisé·e.
Cependant il peut aussi permettre de (re)naître à soi. De choisir avec intention ce que l’on veut garder, réinventer ou laisser derrière soi.
S’affirmer dans son genre, c’est un acte politique autant qu’intime. C’est dire non aux normes qui enferment, et oui à une vie vécue en pleine conscience. C’est parfois prendre un prénom qui nous ressemble. Parler autrement. Se vêtir selon son humeur plutôt que son genre. Ou simplement, avoir le courage d'abord de penser puis pourquoi pas de dire : je ne me reconnais pas dans ce qu’on attend de moi.
Une démarche pour tou·te·s
On associe souvent la question du genre aux personnes trans ou non-binaires. Pourtant, cela concerne tout le monde. La question du genre, les stéréotypes et les conséquences qui en découlent sont partout dans nos quotidiens. Même si vous vous reconnaissez dans le genre qui vous a été assigné à la naissance, avez-vous choisi consciemment la manière dont vous l’habitez ? Avez-vous eu la possibilité de l’explorer, de le remettre en question ? Ou l’avez-vous intégré sans y penser, peut être par conformité, par sécurité ? Est ce que toutes les attentes qui sont liées à ce genre vous correspondent ?
Interroger son genre c’est se demander si ce que l’on vit nous convient vraiment. C’est refuser les rôles imposés. C’est créer de l’espace pour que chacun·e, quel que soit son parcours, puisse exister sans masque.
Une pratique thérapeutique inclusive et engagée
Dans mon approche thérapeutique, je m’attache à créer un espace safe, où chacun·e peut déposer ses doutes, ses questions, ses allers-retours parfois, ses élans aussi.
Je crois profondément que la thérapie peut être un terrain fertile pour déconstruire les normes, pour guérir les blessures liées à l’invisibilité, au rejet, au mal-nommé.
Mon regard est queer et féministe, donc critique sur la question du genre. Il est du côté des marges, des voix étouffées, des corps trop souvent maltraités.
Mais il est surtout du côté de la liberté. Celle d’être soi, hors des cases, hors des scripts.
Alors je vous invite, quel que soit votre chemin et votre endroit actuel : interrogez. Déconstruisez. Expérimentez. Osez :)
Parce que le genre, ce n’est pas un destin. C’est une danse, un langage, une possibilité infinie d’être !
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